Blücher est un très brave soldat, un bon sabreur. C'est comme un taureau qui ferme les yeux et se précipite en avant sans voir aucun danger. Il a commis des millions de fautes et, s'il n'eût été servi par les circonstances, j'aurais pu différentes fois le faire prisonnier, ainsi que la plus grande partie de son armée. Il est opiniâtre et infatigable, n'a peur de rien et est très attaché à son pays; mais, comme général, il est sans talent.
- Napoléon.
Le 12 février au soir, la Marne qui coule entre Château-Thierry et son faubourg arrêta la poursuite française. Vainqueur des alliées, mais impuissant devant le pont en ruine[1], l’Empereur n’a d’autre choix que de rallier ses forces tout en pestant contre l’inaction du maréchal Macdonald. « Si le maréchal Macdonald, comme je l’avais espéré, avait agi sur la rive droite de la Marne, pas un homme n’aurait réchappé »[2].
Il faudra presque une journée pour remettre en état le pont de Château-Thierry. Le maréchal Mortier, chargé de poursuivre l’ennemi en direction de Soissons, ne mettra les pieds dans cette ville que le 13 février en fin de journée[3]. A la tête des divisions Christiani[4], Colbert et Defrance, il parcourra une douzaine de kilomètres avant de s’arrêter pour la nuit. Prussiens et Russes sont déjà loin, il y aura bien quelques escarmouches de parties, mais ils pourront sans mal bifurquer vers Reims et se regrouper à Châlons.
Sur la Seine, le Feldmarschall autrichien Schwartzenberg a tâtonné, mais ses corps d’armée ont tout de même progressé. Les rapports qui parviennent à l’Empereur le 13 février ne sont guères rassurants. Le maréchal Victor s’est battu toute la journée du 11 devant Nogent. Russes et Bavarois se concentrent maintenant devant la ville. Fontainebleau semble aussi menacé, Pajol est durement pressé par la traversée de l’Yonne effectuée par les Autrichiens et Wurtembergeois. De nouvelles dispositions s’avèrent donc nécessaires pour parer à la menace d’un franchissement de la Seine et d’une poussée sur Paris par la Grande armée de Bohème[5]. Le maréchal Berthier ordonne à Macdonald de concentrer à Montereau toutes ses divisions : les débris des 11e et 5e corps et une toute fraiche division de gardes nationales. La cavalerie du général Saint-Germain, à Viels-Maisons, doit l’y rejoindre. Ainsi, l’Empereur souhaite réunir le 15 février à Montereau, 27 000 fantassins et plus de 10 000 cavaliers[6].
Notes
[1] Müffling rapporte qu’il y avait deux ponts.
[2] Napoléon au Roi Joseph, Faubourg de Château-Thierry, 12 fév. 1814. Correspondance, №21233.
[3] « Le duc de Trévise a passé hier le pont de Château-Thierry à cinq heures du soir (…) ». Napoléon au Roi Joseph, Montmirail, 14 février 1814. Correspondance, №21255.
[4] 2e division de la Vieille Garde, rappelons que Christiani en prend le commandement après la blessure du général Michel à Montmirail.
[5] Disposition générales, Château-Thierry, le 13 février 1814. Correspondance, №21244.
[6] Idem.